J’ai lu avec intérêt la plus récente publication Statistiques canadiennes sur le cancer : Rapport spécial 2020 sur le cancer du poumon. Le rapport contient de nouveaux résultats tirés de l’étude ComPARe qui montrent le risque attribuable dans la population (RAP) pour des facteurs de risque connus de cancer du poumon en 2020. Nous voyons les conséquences de la sédentarité, du radon domestique et de la pollution atmosphérique, lesquels représentent 11 %, 7 % et 6 % des cas de cancer du poumon. Le tabagisme, le facteur de risque le plus connu, cause 74 % des cas. Oui, le tabagisme est responsable d’environ trois cas de cancer du poumon sur quatre. Vivre sans fumée reste de loin la meilleure mesure à prendre pour prévenir le cancer du poumon.
Chez les Canadiens, la prévalence du tabagisme a diminué considérablement dans les dernières décennies. Une baisse substantielle du nombre de cas de cancer du poumon s’est ensuivie. Cependant, il est possible de faire plus. Le cancer du poumon est, de tous les cancers, celui qui est associé aux plus forts taux d’incidence et de mortalité au Canada; pourtant, les trois quarts des cas pourraient être évités par l’élimination du tabagisme.
Le rapport fournit de nouvelles statistiques sur le pourcentage de décès par cancer du poumon dus à des facteurs de risque modifiables. Auparavant, seul le RAP pour l’incidence était mentionné. Combinés, les facteurs de risque modifiables expliquent 86 % des décès par cancer du poumon prévus en 2020. Ce nombre devrait baisser à 81 % en 2047, dans l’hypothèse où les taux de tabagisme et de cancer du poumon continuent de décroître. Là aussi, la majorité des décès par cancer évitables sont liés au tabac, soit 75 % en 2020 et 70 % en 2047.
Depuis quelques années, les professionnels de la santé craignent une hausse des taux de tabagisme en raison de la popularité des cigarettes électroniques chez les jeunes et de la légalisation du cannabis. Les effets directs des cigarettes électroniques et du cannabis sur le cancer du poumon ne sont pas connus. Toutefois, ces produits pourraient entraîner une « renormalisation » du tabagisme et une perte des gains enregistrés dans l’abandon du tabagisme. Il s’agit d’une situation qui ne nous permet aucun « faux pas ». Nous devons renforcer les efforts de santé publique pour combattre le tabagisme, y compris les programmes comme Téléassistance pour fumeurs et J’ARRÊTE de même que l’interdiction du tabagisme dans les espaces publics.
Le milieu de la lutte contre le cancer a exprimé des inquiétudes sur la stigmatisation du cancer du poumon et sur le fait que les efforts d’abandon du tabagisme contribuent à créer cette stigmatisation. Les interventions de santé publique et l’éducation ont réussi à faire comprendre au public l’importance de l’abandon du tabagisme. Devant le succès des campagnes antitabac, les gens présument à tort qu’il est facile d’écraser et qu’une personne atteinte d’un cancer du poumon l’est par sa propre faute. Il faut s’attaquer à la stigmatisation du cancer du poumon dans les efforts d’abandon du tabagisme et intégrer des moyens de l’atténuer.
L’effet du tabagisme sur le cancer du poumon constitue à la fois un défi et une occasion. La majorité des cas de cancer du poumon peuvent être évités par l’élimination du tabac. Les efforts de santé publique ont été efficaces pour réduire le tabagisme, mais le travail n’est pas terminé. À l’heure actuelle, un adulte sur sept fume. Bien que ce soit nettement mieux que dans les années 1980 alors qu’il y en avait un sur trois, c’est toujours un très grand nombre de personnes exposées à un important risque de cancer du poumon et de 15 autres types de cancer associés au tabagisme. Il faut poursuivre les efforts collectifs de santé publique visant à réduire l’utilisation du tabac. Un sur sept, c’est encore trop.
Dr Alex Mathieson, FRCSC
Chirurgie générale et oncologie chirurgicale
Professeur agrégé de chirurgie
Université Memorial
Document rédigé en association avec Leah Smith, Ph. D.